Besoin d'explications ⚝ Melinda

Un sourire aux lèvres, Juliet était venue embrasser son mari avant de quitter leur maison. Aujourd'hui, il n'avait eu encore aucune crise et Juliet en était heureuse, espérant qu'il s'agissait du début d'une guérison. Même si au fond d'elle, elle savait que ce n'était qu'un rêve. Elle avait prévu de rejoindre une amie et souhaitait, pour une fois, oublier cette malédiction et ne pas en parler, elle voulait faire comme si tout était comme avant. Compliqué, mais pas impossible selon elle.

Melinda et Juliet avaient passé une bonne heure, dans l'après-midi, ensemble, parcourant les rues froides de Woodbury sans trop discuter de ce qu'il se passait en ville. Les deux jeunes femmes avaient surtout discuté de leur métier et de leurs projets en cours. Comme toujours désormais dans cette ville, il faisait vraiment très froid, glacial. Le vent qui soufflait n'arrangeait rien et donnait une impression d'un froid encore plus violent et désagréable. L'épais manteau, l'écharpe, le bonnet ou les gants de Juliet ne l'aidaient pas à se réchauffer. Avait-elle changé de ville depuis l'année dernière pour que l'hiver approchant soit si rude ? Si la température continuait de baisser ainsi, eux qui n'étaient pas habitués à ça, risquaient de ne plus pouvoir sortir. Juliet avait d'ailleurs prévu un stock de ce qu'elle ne trouvait pas en ville lors de sa dernière escapade dans une grande ville, histoire d'être prudente.

C'est en évoquant ce froid incroyable que Melinda avait proposé à Juliet d'aller un peu chez elle afin de se réchauffer. Juliet n'avait pas hésité une seule seconde, elle pourrait ainsi se réchauffer autour d'un bon chocolat, puis ça lui permettrait également de voir le travail que Melinda faisait actuellement. Après tout, il n'était pas rare que les deux filles se montrent leur travail, échangent des conseils. C'était leur métier qui les avait réunis, elle partageait cette même passion et c'était agréable de pouvoir en discuter avec quelqu'un.

En quelques minutes à peine, elles étaient toutes les deux arrivées chez Melinda et avaient franchi, avec hâte, la porte d'entrée. Le petit ami de cette dernière, Joshua était présent, mais s'apprêtait à sortir. Et c'est là qu'elle le vit. C'est lorsqu'il s'approcha des deux jeunes femmes pour les saluer que les yeux de Juliet avait remarqué ce tatouage, le même que son mari, le même que pour des centaines de gens ici. Personne ne semblait vraiment savoir ce qu'il était. Certains étaient à la recherche d'un bébé depuis quelques semaines qui auraient déclenché tout ça, et même si Juliet avait beaucoup de mal avec ces histoires de sorcellerie et de malédiction, elle s'y intéressait de plus en plus comme s'il s'agissait de son dernier espoir. Une fois que l'homme eut franchi la porte, Juliet ne perdit pas une seconde pour interroger son amie. « Joshua a ce tatouage aussi... » Pourquoi ne lui avoir rien dit ? Melinda paraissait tellement sereine, n'était-il victime que du tatouage sans tous les effets secondaires associés ? Savait-elle des choses qui pouvaient aider Juliet à sauver son époux ? Elle qui voulait ne pas parler de ça aujourd'hui, c'était loupé, mais elle ne pouvait pas laisser passer sa chance.

Melinda avait passé son après-midi avec son amie, Juliet. Cette dernière était dessinatrice, comme elle, mais de livres pour enfants. C’était plutôt rare de trouver, dans une si petite ville, quelqu’un qui partageait la même passion et donc, le même métier qu’elle. C’était sans doute cela qui avait rapproché les deux femmes, elles pouvaient parler des heures de leur passion commune. Elles avaient parlé de leur métier tout en faisant les magasins mais très vite, le temps les avait ramené à la réalité : il faisait un froid de canard. Le vent qui soufflait rendait impossible de rester dehors et Melinda proposa à son amie de rentrer chez elle pour qu’elles se réchauffent autour d’un chocolat chaud. Woodbury n’était pas une ville où il faisait froid, généralement, il y faisait bon et même en cette période de l’année il n’y faisait pas aussi frisquet. Depuis quelques semaines, depuis la naissance de sa fille d’ailleurs, il faisait froid, noir, nuageux et franchement dégueulasse. Comme si la malédiction avait amené avec elle le mauvais temps. Et d’une certaine manière, c’était le cas, la malédiction ne faisait pas qu’attaquer les descendants des chasseurs de sorciers mais également une ambiance morose sur la ville. Si Melinda tentait d’oublier qu’une malédiction planait sur son compagnon et sur sa fille, la grisaille qu’elle pouvait voir par la fenêtre n’aidait pas à oublier. En réalité, il n’y avait pas que le temps qui l’empêchait d’oublier, tout ce qui avait autour ne permettait pas d’oublier. Comment oublier que sa fille était en danger, que l’homme qu’elle aimait était en danger, que les amis qu’elle avait pouvaient l’être ou se retourner contre sa famille si seulement ils savaient d’où venait la malédiction. Mais, pour une après-midi, elle avait espéré pouvoir l’oublier.

Malheureusement, c’était sans compter le destin, le destin qui voulait s’acharner sur sa famille et elle. Evidemment, elle n’était pas la seule touchée par cette fichue malédiction et elle en était à l’origine. Et le plus beau jour de sa vie s’était transformé en cauchemar quand elle avait vu la ville changer du tout au tout. Radieuse, elle était devenue grise ; les gens avaient commencé à développer des symptômes étranges. Elle qui sortait juste de l’accouchement de sa fille Agatha se retrouvait à devoir trouver des solutions pour se sortir de ce mauvais pas. Aujourd’hui, le destin avait décidé de mêler Juliet à toute cette histoire. Quand les deux amies étaient arrivées chez Melinda, elles croisèrent Joshua qui attendait le retour de Mel pour sortir et lui confier la garde de la petite. Après lui avoir fait un baiser, il quitta la maison mais la blondinette n’avait pas prévu que son amie voit le tatouage qui marquait la peau de son amoureux.

« Joshua a ce tatouage aussi... »

La sorcière faisait dos à son amie et son visage changea sans que Juliet ne le remarque. Elle ne s’attendait pas à ce qu’elle le découvre… Elle mit quelques secondes avant de se retourner et de retrouver son visage souriant. Depuis que cette histoire avait commencé, elle essayait de paraître heureuse, malgré tout ce qui lui arrivait. Elle avait besoin de se montrer sous son meilleur jour, elle ne voulait pas que les gens pensent qu’elle n’aimait pas être mère. Parce qu’en réalité, ce n’était pas le cas, elle aimait son rôle, ce qui la minait, c’était tout ce qui se passait autour. Sa fille et son Josh étaient menacés, clairement et ça lui foutait une peur monstrueuse…

« Que veux-tu dire par là ? Tu as aussi ce tatouage ? »

Pendant tout l’après-midi, il ne lui avait pas semblé que son amie avait le tatouage de la malédiction. Se pouvait-il qu’elle l’ait loupé ? Que voulait-elle dire par là ?

« Ne me dis pas que toi aussi tu crois en cette malédiction ! »

Parfois la blonde en disait plus qu’elle ne devait… Peut-être que Juliet n’était au courant de rien et que Mel venait d’en dire plus qu’elle n’aurait dû. Melinda ne voulait pas que son amie soit au courant de qui elle était vraiment, ce qu’il se passait et le fait qu’elle soit à l’origine de la malédiction…

Juliet n'avait pas su comment réagir. Joshua, le petit ami de Melinda, avait ce tatouage aussi, mais elle n'en avait jamais rien dit et surtout, elle semblait tellement loin de tout ce qui arrivait à la ville que Juliet ne l'aurait jamais soupçonné d'en être la victime elle-aussi. Alors elle lui avait dit simplement, sans un mot de plus, sans question, sans précision, elle avait juste dit qu'il possédait ce tatouage. Elle attendait la réponse de son amie, impatiemment, sans vraiment se rendre compte du temps qui s'était passé entre ses mots et les mots de son amie. « Non, pas moi... » Dit-elle en dégageant son poignet comme pour lui prouver ses dires, lui prouver qu'elle y avait échappé. Puis après avoir baissé son poignet, elle releva les yeux vers son amie pour reprendre. « C'est... C'est mon mari qui en porte un... Le même ! Exactement le même au même endroit... » Ce n'était pas la première fois qu'elle croisait une autre personne avec ce tatouage, mais à force de le voir, elle n'y comprenait plus rien. Ils étaient donc si nombreux ? Elle secoua la tête. Comment était-ce possible ?

« Une malédiction ? » reprit-elle. C'était la première, elle n'en était plus totalement sûre, mais presque, qu'elle entendait ce mot associé à tous les événements de Woodbury. Sorcellerie, phénomène naturel, hasard... mais pas malédiction. Pourtant, avec tout ce qui se passait, ce mot semblait tout à fait adapté à la situation actuelle. En tout cas, pour Juliet et son mari, ce tatouage et tous les événements en découlant étaient vraiment une malédiction. « Je ne sais plus en quoi je dois croire ou non ! Certains m'ont parlé de sorcellerie... De la sorcellerie, tu imagines ? Bientôt on va peut-être voir débarquer des femmes sur un balai volant ! » Ajouta-t-elle pour mettre un peu de plaisanterie dans cette ambiance devenue trop lourde.« Sérieusement, je n'arrive pas à me l'expliquer, je n'arrive pas à comprendre qu'une ville entière puisse être touché. Comment autant de gens peuvent avoir un même tatouage, en même temps, apparu comme... comme par magie ? Puis tous les changements en ville... » Soupira-t-elle en se passant une main sur le visage, à bout de nerfs. « Tu sais des choses à propos de tout ça ? » Conclut-elle curieuse et impatiente, ne voyant plus son amie que comme une source d'informations potentielles. Elle qui avait l'intention de passer une journée tranquille, loin de toutes ces histoires.

Melinda ne savait plus quoi faire, elle était prise entre l’envie de partager ses problèmes et ses informations et l’envie de préserver son amie et peut-être même son amitié. Au début, Melinda décida de choisir de la préserver mais plus les informations passaient entre les deux femmes et plus, elle se demandait si c’était réellement la bonne solution. Son amie avait l’air complètement perdue et à la recherche de réponses à ses questions. Elle commença par lui dire que ce n’était pas elle qui était atteinte de la malédiction mais son mari. Pour preuve, elle lui montra son poignet, vierge de tout tatouage comme prévu. Son mari avait donc le même tatouage que tous les descendants des chasseurs de sorcières. Toutes ses questions étaient légitimes, c’était un phénomène étrange et même les plus censés des hommes devaient se rendre compte que quelque chose n’allait pas du tout dans cette ville.

Melinda grimaça quand elle entendit son amie surprise d’entendre le mot « malédiction » associé à ce qui arrivait en ce moment en ville. Elle reprit rapidement un visage normal, elle n’était toujours pas décidée à parler à Juliet de ce qui se tramait réellement dans cette ville. Mauvaise ou pas, c’était sa décision et si elle n’en était pas obligée, elle ne voulait pas le lui dire. Non seulement, elle voulait protéger son amie de tout le côté sombre qui avait derrière cette histoire mais en plus, elle ne voulait pas mettre en danger sa propre famille. Elle avait peur qu’une fois que son amie saurait pour la malédiction, elle chercherait un moyen pour renverser cette malédiction et sauver son mari. Or, la clé de la rédemption était l’enfant, son enfant…

« Tu n’as pas entendu parler de la soi-disant malédiction qui frappe la ville ? Ce sont les gens qui disent ça ! Dès que je mets un pied dehors, je n’entends plus que cela ! »

Melinda décida d’entrer dans le jeu de son amie, de faire sembler de ne rien savoir sur la malédiction que ce qu’on en dit en ville. Ainsi, peut-être pourrait-elle aiguiller son amie sur de fausses pistes. C’était de la manipulation et Mel se détestait pour ce qu’elle allait faire mais il fallait qu’elle protège sa fille. En plus, son but n’était pas de laisser courir cette malédiction mais de trouver une autre solution pour sauver la ville et aussi sa fille. Il devait exister une autre solution pour la rédemption de Woodbury. Mal lui en prit de dévoiler le mot « malédiction » parce que les questions redoublèrent, faisant perdre la tête à Juliet. Bien qu’elle tenta de plaisanter en parlant de balai de sorcière, on sentait bien qu’elle n’en pouvait plus. Melinda eut un pincement au cœur et voulu tout lui raconter mais c’était impossible. Elle s’approcha de son amie pour la prendre par les épaules, pour qu’elle se calme un peu, qu’elle reprenne un peu son souffle.

« Je n’y crois pas ! Je ne sais pas ce qui est arrivé mais je ne crois pas à toutes ces histoires de sorcières ! »

Nia-t-elle en bloc. C’était grisant de remarquer à quel point Mel arrivait à mentir aussi facilement à son amie. Elle ne s’en serait jamais cru capable… Elle jouait à un jeu dangereux parce qu’elle ne se rendait pas compte mais peut-être que cela allait se retourner contre elle, que Jul découvrirait un jour la vérité… Néanmoins, Melinda était tendue, elle n’aimait pas lui mentir, elle n’appréciait pas devoir lui mentir.

« Je ne sais rien de plus que toi, je dois dire que je suis aussi perdue que toi ! Mais, je suis sûre qu’il y a une explication scientifique ! Ce sont peut-être des essais du gouvernement ! Ils testent quelque chose sur nous et on ne s’est rendu compte de rien ! Peut-être que tout finira par rentrer dans l’ordre avant même qu’on comprenne ce qui est arrivé ! »

Jamais son amie ne goberait une telle bêtise. Néanmoins, si elle était encline à accepter l’existence des sorcières, peut-être arriverait-elle à la convaincre.

« Les changements de temps, ça vient peut-être aussi du gouvernement ! Ils ont peut-être mis un dôme au-dessus et ils ont voulu savoir comment on résisterait à de mauvaises conditions ! »

La blonde regardait son amie dans les yeux comme pour lui prouver qu’elle croyait à son histoire.

« Ne t’en fais pas trop ! Je crois qu’on découvrira la vérité plus tôt qu’on ne le croit ! »

Melinda sourit à son amie, un sourire qui se voulait rassurant et qui, elle l’espérait, l’apaiserait…

Juliet n'avait eu envie que d'une chose aujourd'hui : oublier les problèmes qu'elle connaissait, les problèmes que connaissait Woodbury depuis plusieurs semaines désormais. Pourtant, en voyant le tatouage sur le bras de Joshua, l'ami de Melinda, elle ne pouvait pas faire semblant de n'avoir rien vu. Pourquoi son amie avait été aussi discrète à ce propos ? Pourquoi semblait-elle toujours aussi heureuse ? Loin de tous les problèmes actuels ? Peut-être savait-elle quelque chose que Juliet ignorait ? Peut-être avait-elle des réponses rassurantes à donner ? Alors, Juliet ne pouvait s'empêcher de questionner son amie et de parler de ce qu'elle savait : soit, rien. A part des rumeurs sur des sorciers présents en ville, elle n'avait rien sur ces foutus événements qui lui gâchaient la vie depuis si longtemps maintenant.

Le mot malédiction était sorti. C'était étrange d'imaginer qu'une ville entière puisse être maudite. Puis pourquoi ? Et surtout, comment ? Alors qu'elle déballait tout, à bout, son amie vint la prendre par les épaules. Ce contact la rassurait immédiatement. Attentivement, elle écoutait chacun des mots de Melinda. Juliet avait l'impression de ne faire que ça désormais. Elle ne vivait que pour cette malédiction, ou peu importe ce que c'était. Elle écoutait tout, elle parlait à tout le monde, elle cherchait des renseignements et elle s'éloignait autant que possible de l'homme qu'elle aimait plus que tout et de ses changements d'humeur, trop difficiles à supporter. « Le gouvernement ? » répéta-t-elle en haussant les épaules. « Après tout, pourquoi pas ! C'est peut-être l'explication la plus rationnelle que j'ai entendu jusqu'ici. » Dit-elle sans en être convaincue, loin de là même. Mais Juliet avait besoin de croire en quelque chose. Elle avait besoin d'explications pour continuer à vivre. « J'espère ! » affirma-t-elle dans un soupir. Elle espérait que tout rentre dans l'ordre et vite. « Tu sais, je crois que tu es la première personne à qui je le dis aussi franchement, mais je ne sais pas combien de temps je vais supporter ça. J'ai tellement peur. Pourquoi certains ont un tatouage, qu'est-ce qui va leur arriver ? Tu sais que j'aime mon mari plus que tout au monde, vraiment, et j'ai peur qu'il puisse lui arriver quelque chose, de le perdre. Et en même temps, je n'y arrive plus. Il est tellement différent, il change d'une seconde à l'autre sans que je ne comprenne pourquoi et ça m'effraie... Je suis perdue Melinda, je ne sais plus quoi faire. » souffla-t-elle pour vider son sac. « Je dis ça, mais ça doit être pareil avec Joshua, non ? Tu n'as remarqué aucun changement chez lui ? » Peut-être qu non, peut-être que son mari avait tout autre chose, sans lien avec ce tatouage et que tout allait vite rentrer dans l'ordre. C'est en tout cas ce qu'elle voulait croire, ce qu'elle espérait au fond d'elle.

Melinda se sentait mal, mal parce qu’elle mentait à son amie, une amie chère à son cœur. Mais que pouvait-elle faire d’autre ? Elle ne pouvait pas lui dire la vérité, cela signifierait peut-être de mettre en danger sa famille. Il fallait qu’elle trouve quelque chose pour expliquer la situation et elle n’avait trouvé que l’idée d’un essai gouvernemental. Ca lui semblait plus plausible que les sorciers, qui croyaient vraiment aux sorciers ? Evidemment, elle, elle y croyait, elle en était une… Mais Juliet ne semblait pas connaître leur existence ni même avoir entendu parler d’une quelconque malédiction. Alors, cela fonctionnerait peut-être…

« Le gouvernement ? Après tout, pourquoi pas ! C'est peut-être l'explication la plus rationnelle que j'ai entendu jusqu'ici. »

Elle haussait les épaules, elle ne semblait pas si convaincue que cela. Mais Melinda décida de rester sur sa ligne de conduite pour essayer de convaincre son amie bien qu’elle se sentait horriblement coupable de faire une telle chose.

« J'espère ! »

Melinda sourit encore, un sourire forcé bien évidemment, les problèmes s’accumulaient pour elle. Non seulement, son mari était damné mais en plus, Agatha était à l’origine de cette malédiction. La rumeur courait en ville qu’un bébé était l’origine de tout ce malheur et qu’il fallait le retrouver pour le tuer et mettre fin à la malédiction. Plutôt mourir que de voir son enfant être assassiné….

« Mais oui, je suis sûre que tout ira bien ! »

Réussir à convaincre quelqu’un alors que soi-même on ne l’était pas, ça n’était pas évident, pas évident du tout…

« Tu sais, je crois que tu es la première personne à qui je le dis aussi franchement, mais je ne sais pas combien de temps je vais supporter ça. J'ai tellement peur. Pourquoi certains ont un tatouage, qu'est-ce qui va leur arriver ? Tu sais que j'aime mon mari plus que tout au monde, vraiment, et j'ai peur qu'il puisse lui arriver quelque chose, de le perdre. Et en même temps, je n'y arrive plus. Il est tellement différent, il change d'une seconde à l'autre sans que je ne comprenne pourquoi et ça m'effraie... Je suis perdue Melinda, je ne sais plus quoi faire. »

Juliet venait de vider son sac, elle venait de confier à Mel un bout de son âme, ce qui la rendit encore plus triste. Triste de voir que son amie lui faisait confiance alors que Melinda n’y arrivait pas. Sinon, elle aurait pu lui avouer toute la vérité sur la véritable raison de tout ça, elle aurait pu lui dire sans que sa famille ne soit un tant soit peu impliquée. Elle avait surtout peur que Juliet trouve la réponse seule, qu’elle découvre qu’un bébé était à l’origine de tout ça et que ce même bébé était celui de Melinda….

« Je dis ça, mais ça doit être pareil avec Joshua, non ? Tu n'as remarqué aucun changement chez lui ? »

Et là, les larmes montèrent dans les yeux de la blondinette, parce qu’elle avait un trop plein d’émotions depuis des semaines, parce qu’elle ne savait plus quoi faire, parce qu’elle était à bout… Entre deux sanglots, elle réussit à former une phrase :

« Je comprends totalement ce que tu vis, moi non plus, je ne sais plus quoi faire pour Josh ! Il est tellement difficile et différent ! Je n’ai plus l’impression qu’il s’agisse de mon mari ! J’ai parfois l’impression d’être en présence d’un inconnu ! Il est tout le temps de mauvaise humeur, il est en souffrance et fait des cauchemars toutes les nuits ! »

Finit-elle par dire. Elle savait qu’elle ne mettait aucunement en danger son secret alors, elle s’était lâchée à son tour… Puis, elle essaya de reprendre une contenance et quelques minutes plus tard, elle réussit à dire :

« Mais, je ne veux pas craquer, je veux tenir le coup pour lui et pour Agatha ! Il faut que je tienne le coup ! »

Juliet était loin de sa journée rêvée. Elle aurait aimé se balader, discuter, rire et s'amuser. La journée avait plutôt bien commencé, mais à Woodbury, rien ne finissait bien. Il fallait toujours que quelque chose gâche un bon moment. A croire que quelque chose s'amusait avec les nerfs et les émotions de chacun des habitants de cette ville. Joshua, le petit ami de son amie, était touché aussi. Pourquoi ? Comment ? Qu'avait-il en commun avec le mari de Juliet ? Pourquoi eux et pas elles ? Décidément, ce tatouage était vraiment de plus en plus étrange. Les deux jeunes femmes discutaient d'ailleurs de toutes ces horribles nouveautés en ville, entre tatouage apparu subitement et changement d'humeur, il y avait de quoi discuter. Jusqu'à présent, Juliet avait entendu de tout à ce propos. Certains avaient des théories vraiment surprenantes tandis que d'autres en avaient des plus plausibles. Selon la théorie de Melinda, il pourrait s'agir d'un essai du gouvernement. Juliet trouvait que l'idée n'était pas si mauvaise. Elle était en tout cas l'une des plus logiques entendues jusqu'ici. Pourtant, elle n'était pas entièrement convaincue et ne pouvait dire pourquoi. C'était juste cette petite voix au fond d'elle qui le lui disait.

Melinda essayait de rassurer Juliet. Elle le sentait et ça fonctionnait un minimum. Ça lui faisait beaucoup de bien de pouvoir se confier à une amie. Pourtant, elle aussi devait avoir besoin de soutien ? Après tout, si Josh était touché, il y avait des chances pour qu'il subisse les mêmes effets que le mari de Juliet. Juliet s'était lâchée et avait vidé son sac : sa peur, ses craintes et ses doutes. Elle avait tout dit en quelques phrases à melinda. Elle se sentait plus libre, plus vide, même si parler ne changeait rien, ça permettait de libérer l'esprit. Esprit qui ne l'avait plus était depuis des semaines maintenant.

Puis Juliet, inquiète pour son amie, comme elle l'était pour son mari, lui retournait la question. Elle n'imaginait pas qu'elle pleurerait, preuve de la douleur que provoquaient ces événements. Juliet ne put s'empêcher de retenir quelques larmes à son tour. Ça lui faisait mal de voir les gens malheureux à cause de cette histoire. « Je comprends ce que tu vis... » souffla Juliet en serrant Melinda dans ses bras. Elle aimerait tellement faire disparaitre toutes ces peines. Elle ne pouvait s'empêcher de penser à la petite Agatha qui devait subir tout ça alors qu'elle n'était qu'une petite fille innocente encore. « Comment ils peuvent être autant différents ! » ce n'était pas une question, juste quelque chose qu'elle avait besoin de dire. Le silence avait régné durant une minute ou deux, puis Mel avait repris la parole. « C'est plus facile à dire qu'à faire, n'est-ce pas ? On essaye d'être forte, mais voir nos maris décliner... C'est dur... » ajouta-t-elle un sourire triste sur le visage. Pour leur famille, elles essayaient d'être fortes, de ne pas pleurer et de ne pas montrer leur mal-être, mais c'était difficile avec le temps. « Je te jure Mélinda que si j'avais les responsables de tout ça en face de moi, je pourrais les tuer de mes propres mains pour tout ce qu'ils nous font ! » La rage prenait le pas sur la peine et la tristesse parce que c'était la seule issue que Juliet avait trouvé jusqu'à présent. Elle voulait protéger son mari, son famille et ses amis, quoi qu'il en coûte.

Les larmes s’étaient mises à couler toutes seules, naturellement sans qu’elle ne puisse les arrêter. Elle ne voulait pas craquer, surtout devant Juliet qui devait vivre la même chose qu’elle sauf qu’elle ne savait rien du tout de ce qui se jouait en ce moment. Juliet lui avait bien fait comprendre qu’elle était perdue face à tout ce qui arrivait, qu’elle ne savait pas du tout ce qui se passait dans cette ville. Et c’était tout à fait légitime, quelqu’un qui ne connaissait pas l’histoire de chasse aux sorcières de cette ville, qui n’était ni sorcier ni chasseur, ne pouvait pas savoir ce qui se passait à Woodbury. Melinda avait donc fondu en larmes, son amie s’était alors approchée d’elle pour la prendre dans ses bras. Ce fut bienvenu pour la blondinette, elle avait fait tomber toutes les barrières qu’elle se mettait naturellement, elle avait abandonné l’idée d’être forte. Son amie lui dit qu’elle savait ce qu’elle vivait et ça n’était pas étonnant, la brune vivait exactement la même chose qu’elle, sauf que Juliet ne savait pas de quoi il retournait réellement. La blondinette se contenta de hocher la tête, sans rien rajouter d’autre à ce que venait de dire Ju. Puis, le silence tomba entre les deux femmes, certainement pensives par rapport à tout cela, avant que Mel ne termine ce qu’elle avait sur le cœur. Elle voulait tenir le coup pour sa famille, elle se le devait parce qu’elle se sentait si responsable de ce qui arrivait. Evidemment, elle ne dirait rien, elle savait que Juliet risquait de ne peut-être pas comprendre. Melinda ne la connaissait pas encore depuis assez longtemps que pour lui faire entièrement confiance et mettre la vie de sa famille entre ses mains.

« C’est vraiment dur ! »

Melinda avait relevé la tête vers son amie et elle vit un sourire triste apparaître sur le visage de la brune. La blonde ne devait pas être plus joyeuse, elle arrivait encore à sourire de temps en temps mais cela lui demandait un tel effort. Et puis, elle qui avait toujours été si joyeuse, si bonne vivante qu’aujourd’hui, elle n’était plus que l’ombre d’elle-même. Puis, Melinda eut un frisson quand elle entendit son amie dire qu’elle pourrait tuer ceux qui étaient responsables de ce qui arrivait… Était-elle réellement capable de tuer des gens ?

« Tu ne penses pas ce que tu dis, Ju, si ? »

Si ce qu’elle disait était vrai, elle l’avait en face d’elle, le déclencheur de tout cela. Est-ce qu’elle prendrait en compte qu’Agatha n’était qu’un dommage collatéral de tout cela, que les anciennes sorcières avaient utilisé son bébé pour en faire une malédiction ? Pourquoi cela avait dû tomber sur la blondinette, elle qui n’avait jamais fait de mal à personne ?

« Les responsables doivent payer mais les choses sont peut-être plus compliqués qu’il n’y paraît ! »

Melinda jura intérieurement, elle se sentait sur la défensive, ce qui allait peut-être mettre la puce à l’oreille de la jeune femme. Elle se somma d’arrêter de s’enfoncer et se tourna vers la cuisine où elle entreprit de faire le café, elle ne savait pas comment allait réagir son amie, elle préférait en rester là…